Mars 2005 : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27, 46)

« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27, 46)

S’il est une réalité mystérieuse, dans notre vie, c’est bien celle de la souffrance. Nous voudrions l’éviter, mais tôt ou tard, elle survient. Et sous quelle forme ? Un banal mal de tête qui perturbera notre activité de la journée ? Le souci de voir un enfant s’embarquer sur une mauvaise pente ? Un ennui au travail ? Un accident qui emporte un de nos proches ? Un échec à un examen, l’angoisse devant la violence, les catastrophes naturelles ?
Devant la douleur, nous nous sentons désemparés, impuissants. Malgré leur affection, nos proches sont souvent incapables de nous aider. Il nous suffirait pourtant que quelqu’un vienne partager notre peine, même en silence.
C’est justement ce qu’a fait Jésus. Il s’est fait proche de tous, jusqu’à tout partager avec nous.
Il a même été plus loin : il a pris sur lui chacune de nos souffrances, il s’est fait souffrance avec nous, jusqu’à crier :

« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

Il était trois heures de l’après-midi lorsque Jésus lança ce cri vers le ciel. Depuis trois longues heures, il était pendu à la croix, pieds et mains cloués.
Sa courte vie n’avait été qu’un don continuel. Il avait guéri les malades, ressuscité les morts, multiplié les pains et pardonné les péchés. Il avait prononcé des paroles de sagesse et de vie qui ne passeront jamais.
Là encore, sur la croix, il pardonne à ses bourreaux, il ouvre le paradis au larron, il nous offre son corps et son sang après nous les avoir donnés dans l’Eucharistie. Puis il s’écrie :

« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

Mais Jésus ne se laisse pas vaincre par la douleur. Il la transforme en amour et en vie. Et c’est justement après s’être senti si loin du Père que, par un effort pour nous inconcevable, il croit à son amour et s’abandonne à nouveau totalement à lui : « Père, entre tes mains, je remets mon esprit »1.
Il rétablit l’unité entre Ciel et terre, il nous ouvre les portes du Royaume des cieux, il nous rend enfants de Dieu et fait de nous des frères.
C’est ce mystère de mort et de résurrection que nous célébrons à Pâques.
Ce même mystère, Marie, la première disciple de Jésus, l’avait, elle aussi, vécu au pied de la croix. Elle avait accepté de « perdre » son bien le plus précieux, son Fils, Dieu. Au moment où elle adhère au plan de Dieu sur elle, et parce qu¹elle y adhère, elle devient la mère d¹une multitude d¹enfants, notre Mère. » .

« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

Par sa douleur infinie, prix de notre rédemption, Jésus se fait solidaire de chacun de nous, il prend sur lui notre fatigue, nos illusions, nos troubles, nos échecs, et il nous apprend à vivre.
Puisqu’il a pris sur lui toutes les souffrances, les divisions, les drames de l’humanité, je peux penser que, quand je vois une souffrance, en moi ou dans mes frères et sœurs, c’est lui que je vois. Chaque douleur, qu’elle soit physique, morale, spirituelle, me rappelle Jésus, c’est une de ses manières de se présenter à nous, un de ses visages.
Je peux lui dire : « Dans cette douleur, c’est toi que j’aime, Jésus abandonné. C’est toi qui, en faisant tienne ma souffrance, viens me rendre visite. Alors je te choisis, je te serre contre moi ! »
Et si nous continuons ensuite d’aimer, si nous répondons à sa grâce, si nous voulons ce que Dieu veut dans le moment présent, si nous vivons notre vie pour lui, nous pourrons constater bien souvent que la douleur disparaît. Car l’amour appelle les dons de l’Esprit : joie, lumière, paix. Et le Ressuscité resplendit en nous.

 

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